Éducation et Innovation - ma lettre au ministre

Dear readers, I’ve written this note in French… It is a copy of a letter I wrote to a cabinet minister about the French public education system. I hope most of you can follow along!

-Rob

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La semaine dernière j'ai été invité, avec un groupe d’entrepreneurs nantais, à rencontrer le ministre chargé du numérique. Il était accueillant et nous avons eu une conversation intéressante.

Cependant je n'ai pas pu dire tout ce que je pensais… alors je lui ai écrit cet e-mail par la suite.

J’y parle du système éducatif en France, parce que, eh bien, c’est ce qui occupe mes pensées ces jours-ci.

Je sais que Monsieur O n'est pas ministre de l'Éducation. Je sais qu'on dit que l'éducation est impossible à réformer en France.

Mais bon, le sujet pèse sur mon esprit, je n'ai jamais l'occasion de parler à des gens si proches du pouvoir, alors j'ai quand même écrit l'e-mail. Peut-être que certaines de ces idées se retrouveront dans une réunion sur la stratégie de campagne pour la prochaine élection présidentielle. Ou pas. En tout cas, ça fait du bien de l'écrire.

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Bonjour Cédric,

Merci d’avoir passé du temps avec nous, les entrepreneurs nantais ! Le geste est important et apprécié.

Vous m'avez demandé, en tant qu'américain, qu’est-ce que je pense de l'écosystème tech en France ?

J'ai répondu que je suis ravi de la dynamique. Le succès de mon projet, Imagination Machine, est dû en partie à une communauté business accueillante, un gouvernement qui soutient et de vrais partenaires au sein de la BPI. Chez Imagination Machine nous sommes passés de zéro à 200 employés et presque 20 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel en quelques années ! 

Je parlerai bientôt avec des investisseurs, y compris des fonds de dotation universitaires aux États-Unis, pour investir dans un nouveau projet, et je suis confiant de porter le message de la France en tant que puissance montante de la technologie.

Mais il y a une chose que je pense que nous pouvons faire mieux, à mon humble avis – pas en tant qu'américain, mais en tant que personne investie et investissant dans l'avenir de la France. Je vous écris ce retour au cas où cela pourrait être utile à l'administration et à la future campagne.

Je crains que l’éducation nationale ne représente un frein important à l’industrie française et par là même, à la création de richesses.

L'éducation nationale est pleine de gens dévoués et brillants - mais le système peine à enseigner la créativité, l’indépendance de pensée et la remise en question. J’en suis témoin d’une part, en tant que parent de deux filles en maternelle et CP dans une école publique, et d’autre part au sein des universités, grâce aux liens que j’ai créés avec des professeurs et des administrateurs. L'Éducation nationale est conçue pour enseigner le respect des règles, la compétition dans un cadre très défini, où les écoliers sont récompensés pour les réponses correctes et l'échec est à craindre. Les domaines du savoir sont cloisonnés, il y a un sous-investissement dans les arts dès le plus jeune âge, et il n'y a pas d'encouragement à l'innovation ou à l'expérimentation pour les enseignants.

Dans la Silicon Valley, j'ai vu de mes propres yeux comment l'innovation provient d'un manque délibéré de structure, d'une pollinisation croisée entre les arts et les sciences, et de personnes qui ont appris dès leur plus jeune âge à être créatifs. Les fondateurs de Google et d'Amazon ont tous grandi dans les écoles Montessori et ont publiquement crédité cette pédagogie de leur succès. Apple prétend que la combinaison des arts et des sciences est le secret de sa culture interne. Les fondateurs d'Airbnb, YCombinator, Snap et bien d'autres ont suivi des parcours éducatifs mêlant arts et ingénierie.

Je crois que ce même accent sur la créativité, l'indépendance et la pollinisation croisée pourrait être combiné avec la tradition française d'excellence - et le résultat serait extrêmement puissant et bénéfique.

Réformer notre système éducatif en France ne coûterait pas forcément plus cher que notre système actuel. Je n'ai pas de réponses sur ce à quoi devrait ressembler exactement une réforme, mais certaines idées semblent évidentes : consacrer plus de temps au jeu libre dans les premières années de l'éducation, afin que les enfants puissent apprendre à coopérer (crédité par beaucoup comme le secret au succès du système éducatif finlandais). Donner aux enfants de tous âges plus de pouvoir pour choisir leurs activités et cours, et ainsi suivre des parcours plus personnalisés. Passer plus de temps à l'extérieur pendant les jours d'école. Une voie officielle vers un financement public pour les écoles alternatives qui sont actuellement « hors contrat », afin qu'elles puissent être abordables pour un plus grand nombre de personnes. Une « piste » généraliste pour les lycéens et les étudiants qui leur permet de différer le choix d'une spécialité ou d'un métier. Des départements plus transdisciplinaires dans les universités.

De meilleurs salaires et plus de ressources font probablement partie de la solution, mais les investissements plus importants nécessaires sont dans une meilleure stratégie, des politiques et une véritable innovation.

En plus de semer les graines de l'innovation et de la création de richesse futures, ces types de réformes conduiront sûrement à plus d'harmonie sociale dans une nation diverse. Des modèles centrés sur les enfants comme Freinet, Montessori et d'autres pédagogies « alternatives » amènent les enfants à développer la confiance en soi, à se sentir mieux dans leur peau, curieux et respectueux de leurs pairs. Ces traits de caractère conduiraient sûrement à moins de peur et à moins de violence dans la société.

Je comprends que ce genre de réformes ne soit pas nécessairement une bonne stratégie politique. Je ne sais pas s'ils déplacent l'électorat, ils coûteront certainement un capital politique considérable, et les dividendes ne seront pas payés avant des décennies. Une vraie réforme ne changerait pas seulement les détails, elle changerait notre philosophie de l'éducation.

Cependant, si notre objectif est d'annoncer une nouvelle ère du pouvoir français, de passer à une ère de croissance, d'harmonie sociale et de leadership, alors un engagement profond dans la réforme de l'éducation me semble l'investissement le plus important que nous puissions faire. C'est un véritable investissement dans l'avenir.

Je m'excuse si ces suggestions ne sont pas les bienvenues, et bien sûr je n'attends pas de réponse. Je n’ai pas souvent l’opportunité de parler à un ministre ! Ces suggestions n'ont aucun impact sur mon entreprise. Je les propose dans un esprit de citoyenneté et d'optimisme.

Bien à vous,

Rob Spiro